Ce blog, consacré à la problématique bâtiment - ville et énergie, souhaite apporter sur ce vaste sujet quelques éléments de réflexion utiles.

À cette fin, il incorpore de nombreux liens vers des sites et articles qualifiés.

mardi 28 avril 2015

Bâtiments en France : stock, flux et performance énergétique



Plusieurs publications, régulièrement mises à jour, décrivent le parc bâti métropolitain, les flux annuels de construction et la consommation énergétique des divers segments. Certaines sont listées en fin de l’article ci-dessous dans lequel on retrouve quelques valeurs utiles.

Stock

En arrondissant, en 2013, la France métropolitaine compte 33,4 millions de logements qui se répartissent en  18,8 millions de maisons individuelles et 14,6 millions d’appartements.
Parmi ces derniers : 4,6 millions de logements sociaux et 8,7 millions de logements en copropriété.

La surface totale du parc non résidentiel est de 931 Mm2, dont 57% dans le secteur privé et 43% dans le public.

Ces surfaces du secteur public se distribuent en un tiers pour l’État et deux tiers pour les collectivités territoriales (majoritairement en bâtiments d’enseignement). 

Flux

Pour la construction neuve, les chiffres (2013) de la FFB, font état de la mise en chantier de :
  • 332 000 logements qui se répartissent pour moitiés entre la maison individuelle et le logement collectif et correspondent à une surface de plancher de 30 Mm2. Le ratio du flux sur le stock vaut 1%, valeur souvent mentionnée.
  • 27 Mm2 de bâtiments non résidentiels, se répartissant comme illustré ci-dessous,



Pour la construction neuve, les montants de travaux ont été, en 2013, de 34 G€ pour le logement (soit un prix moyen de 1 134 €/m2) et de 21 G€ hors logement.

Performance énergétique

Dans son édition 2013 des chiffres clés du bâtiment, l’ADEME fait état des consommations finales suivantes :
  • Non résidentiel (2011) : 226 TWh,
  • Résidentiel (2012), hors bois : 402 TWh, auxquels il convient d’ajouter une consommation de bois estimée à 6,3 Mtep.
L’analyse statistique des diagnostics de performance énergétique (DPE) des logements a permis de produire une photographie du caractère plus ou moins énergivore du parc. Un résumé de celle-ci a été publié en juillet 2014 par le Commissariat général au développement durable.

La distribution des logements sur les diverses étiquettes ressort comme indiquée ci-dessous et on renvoie à l’article pour une analyse plus fine, notamment par période de construction.



Avec un flux annuel de l’ordre du % de la taille du stock, et un taux de remplacement encore inférieur (0,3%), réduire la consommation énergétique des bâtiments, et les émissions de gaz à effet de serre qui lui sont associées, passe par la rénovation du parc dont, comme illustré ci-dessus pour les logements, une fraction conséquente est très énergivore.

L’amélioration progressive de la performance de ce parc, en commençant pars les bâtiments les moins sobres, est l’enjeu de l’intéressante proposition d’un Passeport efficacité énergétique faite, en juin 2014, par le groupe de réflexion The Shift Project.

Pour aller plus loin :



mercredi 8 avril 2015

Innovation & acceptation de l’incertitude, du risque

Photographie TBB - 2007
Pour apprécier la manière avec laquelle est évaluée, en France, l’innovation (qu’elle soit relative au secteur de la Construction ou non), il est intéressant de faire un détour par les travaux menés par le psychologue néerlandais Geert Hofstede sur les différences culturelles.

Celui-ci, en s’appuyant sur l’analyse de très nombreuses enquêtes menées à travers le monde, a proposé de « projeter » ces différences culturelles sur un espace multidimensionnel.
Au fil des années et au fur et à mesure de l’enrichissement des bases de données et de l’approfondissement de sa réflexion sur le sujet, le nombre et la définition de ces dimensions ont évolué.

Elles sont aujourd’hui au nombre six : la distance hiérarchique, le contrôle de l’incertitude, l'individualisme et le collectivisme, la féminité et masculinité, l’orientation à court terme/long terme, l’indulgence/sévérité.

Sur chacun de ces six axes qui structurent l’espace proposé comme représentation des différences culturelles, et pour chacun des pays pour lesquels la base de données est d’une taille suffisante pour pouvoir se livrer à un exercice quantitatif, une valeur, de 0 à 100,  est attribuée.
Ces valeurs sont des moyennes et elles ne signifient pas que chaque ressortissant d’un pays considéré s’aligne parfaitement sur celles-ci.

Elles sont néanmoins fort intéressantes et permettent de se livrer à des exercices de comparaison entre pays.
C’est ce qui est fait ci-dessous pour cinq pays (France, Japon, États-Unis d’Amérique, Chine et Allemagne).



Concentrons-nous sur l’axe qui pointe vers le bas, Uncertainty avoidance, qui signe la relation à l’incertitude, l’acceptation, plus ou moins grande du risque.
Avec un « score » de 86, les français se situent parmi ceux qui sont les plus mal à l’aise avec l’incertitude et le risque (dans la base de G. Hofstede les valeurs extrêmes sont de 23 pour le Danemark et de 95 pour la Russie).

Cette dimension, comme les autres, est acquise, par immersion dans l’environnement culturel, et non pas innée. Cela est heureux car, si tel était le cas, on peut se demander si les petits Français oseraient tenter la marche debout, assurés qu’ils seraient de tomber plus d’une fois avant d’y parvenir !

Cette aversion au risque et à l’incertitude se traduit par nombre d’éléments, variés, de notre quotidien comme la codification massive, une extraordinaire prolixité réglementaire et normative, une relation compliquée à l’autre, à l’étranger, la nature des placements des économies des Français (assurance vie plutôt qu’actions)…

De façon sclérosante pour le pays, elle a été gravée au plus profond, en février 2005, lorsque le Parlement, réuni en Congrès, a inscrit la Charte de l'environnement dans la Constitution, installant par là même dans celle-ci le principe de précaution (art. 5).

Appliquée au cas de la construction, cette forte aversion à l’incertitude se traduit aussi par le fait que le désir d’investir peut être totalement congelé s’il apparaît que le contexte (réglementaire, fiscal, incitatif …) peut évoluer rapidement, voire brutalement, mettant à mal la visibilité attendue d’un investissement dans le bâtiment.
Cette aversion au risque trouve également un reflet dans la diversité des modes d'évaluation technique des procédés constructifs innovants.

Sur cet axe, comme sur les cinq autres, il n’y a pas de « bonne » ou de « mauvaise » réponse ou position. En revanche, il est utile d’être conscient de ce qu’est notre situation par rapport à celle des autres et du fait que ce qui peut nous sembler logique, voire naturel, n’a en fait, le plus souvent, rien d’universel.
Si le Français souhaite que tous les voyants soient au vert pour démarrer, il n'en va de même pour les autres, ce qui est bon à savoir dans un environnement concurrentiel.
Comme toujours, il est précieux de se connaître (Γνθι σεαυτόν).


Petit bonus web : Entretien, passionnant, avec Geert Hofstede (en anglais)

vendredi 3 avril 2015

BIM – numérique et bâtiment

Photographie TBB - 2009

L’acronyme BIM est devenu omniprésent, avec des acceptions variées.
BIM n’est pas l’anagramme d’une société étatsunienne, pilier historique de l’informatique mondiale, ni une poutre anglaise mal orthographiée mais renvoie plutôt, selon les interlocuteurs, à Building Information Model, Building Information Modeling, Building Information Management, Bâtiment et Informations Modélisées ou, plus simplement, à la maquette numérique.

Il s’agit d’une représentation du bâtiment unique, partagée par l’ensemble des acteurs, interopérable car s’appuyant sur un format de fichier commun (conforme à la norme IFC - Industry Foundation Classes) et contenant toutes les informations techniques du bâtiment utiles aux diverses étapes (conception, exploitation, maintenance), éventuellement précédés des étapes d’identification et de diagnostic en cas d’intervention sur l’existant.

En pratique, il s’agit d’adapter aux spécifiés du secteur de la construction des méthodes de travail collaboratives, une ingénierie concourante, employées depuis longtemps dans certains secteurs industriels comme l’automobile ou l’aéronautique.  Les spécificités précitées sont au moins de deux ordres :
  • Chaque bâtiment est unique (prototype versus série industrielle),
  • Les intervenants dans l’acte de construire sont nombreux, variés et de tailles fort diverses.

 Le sujet n’est pas nouveau mais il a pris du relief en France ces derniers mois à travers la Mission confiée par la Ministre du Logement à Bertrand Delcambre, sur ce sujet (juin 2014). Suite à une consultation et à un recueil de contributions très larges, ce dernier a remis un rapport en décembre 2014, lequel a débouché sur le lancement d’un plan de transition numérique dans le bâtiment, doté d’un budget de 20 M€.

Le « BIM Manager »

L’ensemble des acteurs (maîtres d’ouvrage, architectes, ingénieries, entreprises, industriels, exploitants) collaborant et alimentant la maquette virtuelle et partagée du bâtiment est vaste, si bien qu’il est nécessaire que l’exercice soit coordonné. C’est le rôle dévolu au « BIM manager ».

Les pays anglo-saxons sont caractérisés par une fonction maîtrise d’œuvre / ingénierie puissante. C’est elle qui le plus souvent assure le rôle de « BIM manager ». En France, la situation est différente et l’on peut augurer que, dans nombre de cas, l’entreprise générale jouera ce rôle.
Les contributions des plus grandes d’entre elles à la Mission Numérique du Bâtiment illustrent la pratique qu’elles ont déjà du BIM, notamment via les grands chantiers à l’export.

La « biographie numérique » du bâtiment

À terme, tout bâtiment sera doté de sa « biographie numérique». Nous dénommons ainsi ce qui s’apparente à des concepts en cours de développement comme la « carte vitale du bâtiment », projet issu de l’un des chantiers du Plan Bâtiment Durable, le « passeport efficacité énergétique » ou le carnet numérique de suivi et d’entretien du logement, tous dispositifs susceptibles d’accélérer la transition énergétique et numérique du bâtiment.

Recevant cette biographie numérique de son nouveau logement (pour prendre un exemple), le propriétaire pourra y trouver des réponses à des questions variées, portant sur la chaîne programmation – conception – construction – maintenance et dont quelques exemples sont :
  • Quelle est l’histoire du bâtiment, de sa construction, qui l’a conçu, construit, transformé ?
  • Quel est son système constructif, quels sont ses matériaux constitutifs, d’où proviennent-ils ?
  • Quelles mesures ont été réalisées sur lui, pendant la construction, à la livraison, depuis celle-ci ?
  • Quelles sont ses performances, théoriques, intrinsèques ?
  • Quelles sont ses consommations, pour quels usages ?
  • Comment l’entretenir, à quelle fréquence, qui peut le faire ?

Pour qu’existe, à une vaste échelle, cette biographie numérique du bâtiment il faut que les outils permettant de la créer (tant pour le neuf que pour le stock)  existent, qu’ils soient accessibles à ceux qui ont à écrire certains chapitres de cette biographie et que ceux-ci, y compris les plus petites structures, soient en capacité de les utiliser, ce qui requiert équipement, formation, confiance et intérêt objectif.

Enjeux pour les petites entreprises de construction

Un des enjeux de la numérisation de l’acte de construire et du regroupement de ses acteurs autour de représentations partagées est de veiller à ne pas marginaliser les petites entreprises, lesquelles représentent l’essentiel du marché. 
Pour ce faire, les applications, notamment mobiles, mises à disposition des entreprises doivent intégrer les attentes de celles-ci, être d’un coût raisonnable, d’une appropriation  aisée, d’une utilisation adaptée et d’un apport évident en matière de fonctionnalités nouvelles, de gain de temps, de productivité, de qualité, de traçabilité …
Le parcours qui conduit  une petite entreprise de construction vers le niveau de connaissances et compétences lui permettant de recourir en confiance  les outils de la démarche BIM est consubstantiel de la feuille de route qui conduit à la généralisation de la biographie numérique.

Il est nécessaire que tout au long de ce parcours, l’entreprise puisse s’alimenter à une « source » de qualité, fiable, neutre, accessible et essentiellement gratuite. Cette source prendra la forme d’un Portail du numérique (annoncé pour juin 2015) dont quelques éléments sont indiqués ci-contre.
Les deux diagrammes ci-dessous illustrent schématiquement le « chemin » vers la « biographie » numérique du bâtiment ainsi que les modes de sollicitation de ce portail.
Portail du numérique – contenu indicatif

-      Bibliothèque d’outils adaptés à la taille des acteurs et des projets + guides et modèles
-      Bonnes pratiques, REX, mutualisation, alimentés à l’échelle nationale
-      Bibliothèque de documents de références
-      Bibliothèque d’ouvrages-types
-      Formation : en ligne / kits pédagogiques en téléchargement
-      Exemples d’équipement informatique requis
-      Newsletters en abonnement
-     








mercredi 1 avril 2015

Analyse de cycle de vie de bâtiment

Photographie TBB - 2010
L’analyse de cycle de vie (ACV) d’un bâtiment est une évaluation de son impact environnemental.

Il s’agit d’une aide à la décision, susceptible d’être utilisée à plusieurs étapes d’un projet (conception, diagnostic, réhabilitation …), qui permet de répondre à des questions du type :
  • Où implanter le bâtiment ?
  • Quels matériaux, produits, systèmes utiliser ?
  • À quelle source d’énergie recourir ?
  • Vaut-il mieux déconstruire puis reconstruire ou rénover ?
  • ...

      Pour aider à la prise de décision, les outils d’ACV de bâtiment (ils sont nombreux) produisent une série d’indicateurs environnementaux entre lesquels l’utilisateur arbitre en fonction de la nature de son étude.

Pour « projeter » le bâtiment sur ces indicateurs, un tel outil se nourrit essentiellement à trois sources :
  • Un métré du bâtiment fournissant, produit par produit, les quantités utilisées pour sa construction,
  • Une base de données d’ACV de ces produits et systèmes constructifs, si elles existent,
  • Les consommations de tous ordres (énergie, eau …) prévues sur la période retenue pour l’analyse de cycle de vie.


      Au-delà  du moteur de calcul et du périmètre retenu pour l’analyse, constitutifs de l’outil d’ACV,  l’élément déterminant de l’exercice est constitué de la base d’ACV des produits et de la manière dont sont traités les produits ne disposant pas d’une telle ACV.

L’utilisateur, conscient, y veillera tout particulièrement, de même qu’un fabricant de cannelés utilisera d’excellents œufs, farine, lait, vanille, associés à un four performant. En effet, il sort toujours quelque chose d’un four de même qu’il sort toujours quelque chose d’un logiciel (confer le film du regretté réalisateur polonais Krzysztof Kieslowski illustrant le commandement du Décalogue un seul Dieu tu adoreras, 1988)

En France, les outils d’ACV de bâtiment couramment utilisés sont ELODIE, EQUER, TEAM Bâtiment, lesquels s’appuient sur tout ou partie des bases de données d’ACV produits INIES, ECOINVENT et DEAM.

L’analyse de cycle de vie d’un bâtiment peut également être réalisée avec un logiciel généraliste, appliqué au cas particulier d’un bâtiment. Le logiciel SimaPro en est un exemple.

Petit bonus web :
En matière d’impact environnemental d’un bâtiment, doté de toutes ses fonctions, la sobriété indépassable est atteinte par le cas, certes d’application géographique limitée, de l’igloo.
La construction d’un tel ouvrage a été immortalisée par le réalisateur Robert Flaherty dans le film Nanouk l’Eskimau (1922).